Photo P Mathiaux by kind permission Musée Mandet
Ce tableau, intitulé
« La bataille de Rezonville », est un fragment du
panorama du même nom, exposé à Vienne, puis à Paris à partir de
1883, et peint par Edouard DETAILLE et Alphonse DENEUVILLE. Il
représente une bataille qui a eu lieu le 16 août 1870, remportée
par la France et qui a coûté la vie à plus de 32 000 hommes.
Le phénomène du
panorama apparaît à la fin du XVIIIe siècle en France et en
Angleterre. C’est un vaste tableau circulaire placé autour d’une
rotonde de façon à ce que le spectateur voie les objets représentés
comme si, placé sur une hauteur, il découvrait tout l’horizon
environnant. Le but de ce dispositif est de déstabiliser les
spectateurs qui ont le sentiment d’être transportés au cœur même
de l’action et du lieu représenté. Le panorama est en fait un
moyen d’informer avant l’apparition du cinéma. Les thèmes les
plus fréquemment présentés furent des paysages urbains, des
paysages de batailles et des scènes bibliques.
La réalisation d’un
panorama nécessite des techniques particulières différentes selon
l’époque et le peintre. Par exemple, Detaille et Deneuville se
servaient de la photographie pour réaliser leurs panoramas.
De nombreuses rotondes
ont été construites pour présenter ces panoramas. Elles sont
situées dans de grandes villes. Le panorama de Rezonville a par
exemple été exposé à Vienne et Paris.
Detaille a joué un grand
rôle dans l’évolution du panorama, c’est grâce à lui que le
panorama est devenu de la peinture historique.
Detaille et Deneuville
ont décidé de collaborer car ils avaient la même idée de projet
mais aussi car l’ampleur de la tâche était très importante. Ils
ont réalisé en même temps que « La bataille de Rezonville »
un autre panorama intitulé « La bataille de Champigny »,
qui est considéré comme son pendant.
Après 1900 presque tous
les panoramas existants ont été détruits. Le panorama de
Rezonville a été conservé dans sa quasi-totalité et a été
découpé en 115 fragments répartis dans une multitude de musées.
Edouard DETAILLE
(1848-1912) était peintre de bataille, il a peint la guerre de 1870
toute sa vie car il y a participé. Toutes ses peintures et donc le
panorama de Rezonville nous sont de ce fait présentés selon la
façon dont Detaille voit la guerre (point de vue subjectif). Le
panorama de Rezonville a entièrement été conçu par Detaille mais
réalisé par Detaille et Deneuville.
Alphonse DENEUVILLE
(1836-1885) a également participé à cette guerre mais le panorama
de Rezonville est nettement plus de la main de Detaille que de la
main de Deneuville car ce dernier était gravement malade lors de sa
réalisation.
Comme expliqué
précédemment, la peinture du musée n’est donc qu’une petite
partie de la grande frise originelle. D’après certaines sources,
le fragment de Riom ne serait que de la main de Detaille.
La
bataille de Rezonville s’est déroulée lors de la guerre
franco-allemande de 1870, plus exactement le 16 août de cette même
année, opposant l’Empire Français au Royaume de Prusse. Cette
dernière dura environ six mois, et la défaite française entraîna la
chute de l’Empire de Napoléon III, ainsi que la perte du
territoire d'Alsace-Lorraine au Nord-Est de la France. Le pays entre alors dans une
nouvelle période appelée « La Commune » (1871).
Réalisée entre 1881 et
1883, soit un peu plus de dix ans après les faits, « La
Bataille de Rezonville » illustrant des scènes de blessés,
d’ambulances, de morts, prussiens et français, souvent à côtés
de cadavres de chevaux, etc. n’est pas peinte comme les autres
tableaux de guerre de l’époque : tout d’abord parce que
c’est un fragment de panorama, deuxièmement parce qu’elle
représente la scène après la bataille, le soir, et non pendant le
combat, mais surtout parce qu’elle représente la réalité,
nettement moins glorieuse et idéaliste que le reste des œuvres de
l’époque, débordants d’anecdotes et de gestes héroïques.
La
partie étudiée reflète bien la vision des choses des deux artistes.
En effet, dans cette huile sur toile de 1,69 m de long sur 1,29 m de
large, l’intensité dramatique se dégage de l’austérité de la
vision des cadavres : et bien non, la guerre n’est pas jolie !
Detaille et Deneuville ont réalisé cette œuvre car la Société
du Panorama National le leur avait demandé (c’est
d’ailleurs à ce moment là qu’ils se sont rencontrés), mais
également car l’envie de dénoncer la cruauté sanglante du combat
était trop forte : et oui, ils y étaient à cette guerre, ils
l’ont faite ! Les peintres ont donc pris des risques en
représentant de cette manière la bataille, surtout au XIXème
siècle, époque de l’Académisme, courant artistique européen
instaurant des principes et des règles à la peinture.
Si l’on s’approche
plus près du tableau, on peut remarquer que la peinture a été
appliquée par petits traits, assez épais tout de même, un peu à
la manière impressionniste (effet qui contraste quand même avec la
volonté réaliste de cette œuvre) . Il est évident que ce
rendu flou est voulu : le panorama est fait pour se regarder de
loin ; cependant, cette impression peut également être
interprétée comme le flou de la guerre.
Les deux hommes que l’on
voit à terre sont en fait un chasseur et un soldat, morts. Ils sont
tous deux vêtus de l’habit bleu, blanc et rouge de l’armée
française, et sont entourés par des arbustes.
Le chasseur tient son
fusil de la main gauche. La bouche est ouverte comme si un cri de
douleur et de rage en émanait. On peut donc voir ici que les
artistes affirment une nouvelle fois leur côté antimilitariste.
Quant à lui, le soldat
n’a pas de blessure visible. Sa main droite, inerte, tient encore
fermement un clairon détail pathétique de l’œuvre : symbole
du brillant dans la peinture militaire, le clairon à terre devient
ici l’image même de la défaite. On ne voit pas son visage.
Sur une borne en bas à
droite du tableau sont marqués les noms de Deneuville et de
Detaille, ce dernier ayant pourtant refusé de signer les fragments
du panorama.
La peinture n’est pas
très lumineuse, les contrastes sont marqués par les couleurs rouge,
bleu et vert (le rouge et le vert étant des couleurs
complémentaires), mais le marron et le beige dominent.
L’organisation est plutôt centrée vers la gauche, l’ambiance
est morose et austère.
Cette œuvre nous a
attiré par les sentiments de tristesse, de peine, et surtout de
violence et de haine qui s'en dégage. On se retrouve immergé dans
cette peinture, qui nous a donner envie de comprendre et de ressentir
les émotions des personnages.
Ce tableau nous fait connaître une partie de
l'histoire française et l'horreur de la guerre. Détaille et Deneuville condamnent dans cette œuvre le mépris des hommes politiques envers les soldats
français et prussiens.
Photomontage by the authors (click on the image to enlarge)
This painting, entitled
“La Bataille de Rezonville”, is a fragment of a panorama,
which has the same name. Exhibited in Vienna, then in Paris in 1883,
and painted by Edouard DETAILLE and Alphonse DENEUVILLE, it
illustrates a battle which took place on the 16th of August 1870, won
by France and which cost more than 32000 lives.
The panorama phenomenon
appeared at the end of the 18th century in France and in England. It
is a huge circular board placed around a circular building, generally
in stone, called a rotunda, so that the onlooker sees the represented
objects as if he was placed on a hill and discovered the entire
surrounding horizon. The aim of this system is to destabilize the
spectator, who feels transported at the centre of the action. In
fact, the panorama was a means to inform people before the advent of
cinema. Towns, battles, and biblical scenes were the most frequently
represented.
Panoramas required
particular techniques which evolved over time. For example, Detaille
and Deneuville used photography to make their panorama.
Numerous circular
buildings were built to present these panoramas. They were situated
in big cities. The Rezonville panorama was exposed in rotunda in
Vienna and Paris.
Detaille played a large
part in the evolution of the panorama; it is thanks to him that the
panorama came to be considered serious historic painting.
Detaille and Deneuville
decided to collaborate because they had the same idea for this
project but also because the scale of the work was so very large.
They made, at the same time as “La Bataille de Rezonville”
an other panorama called “La bataille de Champigny”,
which is considered as its twin.
After 1900, almost all
the existing panoramas were destroyed. The Rezonville panorama was
almost entirely preserved but cut up into 115 pieces and distributed
to a number of museums.
Edouard Detaille
(1848-1912) was a war painter. He painted scenes from the 1870 war
several times during his life; he had fought in this war. His
paintings show how he saw the war.
Alphonse
Deneuville (1836-1885) also took part in this war but the Rezonville
panorama is much more Detaille's work
because Deneuville was seriously ill at the time.
As explained previously,
the painting of the Mandet museum is only a small part of the
original. According to certain sources, the Riom fragment was by
Detaille.
The
Rezonville battle took place during the war of 1870, which set the
French Empire against the Kingdom of Prussia. The war lasted
approximately 6 months, and the French defeat was the cause of the
fall of Napoleon III’s Empire, as well as the loss of the territory
of Alsace-Lorraine, 2 regions situated in the Northeast of France. As
a consequence, the country entered a new age called “La Commune”
(1871).
Painted between 1881 and
1883, more than 10 years after the war, “La Bataille de
Rezonville”, shows scenes of injured people, ambulances, dead
men, Prussian as well as French, often next to the corpses of horses,
etc. It is not painted like other war paintings of this period,
because it represents the scene after the battle, in the evening, and
not during the fighting itself, but also because it represents
reality, obviously less glorious and idealistic that the rest of the
paintings in this era, overflowing with heroic gestures.
The work reflects the
vision of the two artists. In this oil painting, which is 1,69m long
by 1,29m tall, the dramatic intensity appears with the austerity of
the corpses: the message is clearly that war is wrong! Detaille and
Deneuville made this work because the "Société du Panorama
National" commissioned it, but the way they chose to depict the
subject is all their own; they wanted to denounce the bloody cruelty
of the fighting. The painters took risks by representing the battle
in this way, in a period when academic art imposed its principles and
rules.
If we look closely at the
picture, we notice that the painting was applied in small lines, in a
way the Impressionists did (which contrasts with the realistic aim of
the work). Since the panorama was made to be looked at from afar, it
is obvious that this soft-focus was intentional. However, it could
also be a way of symbolizing the confusion of war, our difficulty in
apprehending it. The two soldiers on the ground are both dressed in
the blue, white and red uniform the French army, and are surrounded
by shrubs. One holds his rifle with his left hand. The man has a
bloodstain on the left temple, and the eyes are shown as a black
shadow. The mouth is open as if a cry of pain and fury had emanated
from it. The artists, it is obvious, are against the war...
The other soldier has no
visible wounds. We don’t see his face. The right, inert, hand
clutches a clarion. It is a poignant detail of the work, a symbol of
defeat.
On the boundary stone are
marked the names of Deneuville and Detaille.
The painting is not very
bright, the contrasts are marked by colors red, blue and green (the
red and the green are complementary colors), but brown and beige
dominate. The organization is rather centered on the left, the
atmosphere is gloomy and austere.
This work attracted us
because it captures so well the feelings of sadness, sorrow, and
above all of violence and hate that emanate from it. When we look at
this painting, we feel submerged by emotion; it makes us want to
understand the scene.
This painting reminds us
of an important moment of French history, and shows us that war is
terrible. These innocent men died because of the quarrels of a few
powerful men.
Sources: